FC Barcelone – Real Madrid
Milan AC – Inter Milan
Marseille – Paris Saint-Germain
Ce dimanche est un dimanche d’Europe. Une Europe se parant de trois matches aux parfums aussi classiques qu’historiques. C’est un jour rarissime de football total que ce 7 octobre 2012. Qui nous offre trois « classicos » européens, quasiment en même temps. Un vrai week-end de fashion week du ballon rond.
Ce soir, marchands de bières et de pizzas béniront l’uniformisation européenne, les fans de ballon se féliciteront d‘avoir des abonnements à toutes les chaînes de sports (en France par exemple, les trois matches seront retransmis en direct, sur beIn 1, beIn 2, et sur Canal+) quelques télécommandes vont y laisser leurs boutons.
Ce soir, et quel que soit son rendement lors du clasico français, Zlatan Ibrahimovic deviendra un symbole européen. Nous verrons cela en fin d’article.
De quoi « Clasico » est-il le nom
Entendons-nous déjà sur ce mot : « classico » , qui se dit et s’écrit également « clasico ». Un classico oppose plus que deux clubs : il oppose deux villes, ou deux régions, déchirées par les luttes de suprématies nationale, économique ou politique. Deux régions, deux histoires, deux civilisations. Un classico oppose en général le nord et le sud (OM-PSG ; Naples-Milan). Un classico est classique car il revient chaque saison, signifiant au passage que les deux clubs sont depuis toujours dans la même élite. L’un de ces clubs est en général celui de la capitale, l’autre celui d’une ville qui honnit la capitale : on ne gagne pas un classico, on gagne une guerre. Il n’est donc pas question de perdre un classico.
Un classico, c’est le grand soir de la lutte des classes, version football
En France, c’est OM-PSG. Au Portugal, Benfica Lisbonne – FC Porto. En Italie, c’est Inter Milan – Juventus Turin (lutte pour la suprématie au Nord), Naples – Juventus (le pauvrissime Sud qui défie les nantis du Nord), ou Rome-Naples (la capitale du pays unifié contre celle de la mafia). En Algérie, c’est la Jeunesse Sportive de Kabylie contre le MC Alger. En Espagne, c’est Real Madrid – FC Barcelone, match où l’Espagne règle ses comptes avec le franquisme.
20 h : Barça – Real
C’est justement par ce règlement de comptes, le 253e match entre les deux clubs, que débutera la soirée de gala européenne. Depuis trois ans maintenant, Barça et Real sont considérés comme les plus grands clubs du monde. Tous eux ont le meilleur joueur du monde : Messi à Barcelone et Cristiano Ronaldo à Madrid. Depuis lors, tous les clasicos espagnols sont retransmis en direct sur la planète entière : 600 millions de téléspectateurs en moyenne, dont quatorze sur la péninsule ibérique (Chiffres : menly.fr). Pour comparaison, un match OM-PSG, qui n’est retransmis qu’en France, en attire 3.5 millions.
Real et Barça s’affrontent plusieurs fois par an : deux matches de Liga, mais aussi, conséquences de leurs titres annuels et divers, des Supercoupe d’Espagne, de Coupes du Roi… voire la Champions League (remember 2011). Le match de ce soir est déjà le troisième de la saison entre eux, après que le real ait emporté la Supercoupe d’Espagne en août. C’est le sixième de l’année civile 2012, le treizième depuis 2011 ! Une douce indigestion qui génère toujours un scénario différent. On se rappelle les joutes orales entre Guardiola et Mourinho, on se rappelle le doigt dans l’œil de ce dernier à l’adjoint catalan en 2011, on se rappelle les clasicos hyper tendus de 2009 à 2012, on se rappelle aussi la « manita » (5-0) du Barça en décembre 2010.
Barça-Real, c’est la catalogne contre le Royaume. Ce soir d’ailleurs, un tifo exceptionnel devrait être déployé, aux couleurs sang et or de la « senyera », le drapeau officiel catalan (dont les couleurs diffèrent d celles du mouvement indépendantiste). La province est, on le sait, en proie à un regain de sentiment indépendantiste depuis des mois. Un sentiment que porte aussi le président du club, Sandro Rosell, lui-même militant indépendantiste. Un tel tifo, accepté par le club, est un défi très clair au Real, l’équipe du Roi et de la langue espagnole.
Barça-Real est peut-être le match le plus politique de la planète. C’est aussi le match entre les deux meilleurs joueurs du monde, dont on voudrait qu’à chaque fois qu’il règle la question : qui est LE meilleur ? On sait qu’un match ne règle ni une guerre personnelle ni une question politique. Mais un match, laissant ces questions en suspend, leur donne également vie. Le football, c’est la vie.
20h45 : Milan AC – Inter Milan
Le match entre les deux clubs milanais a la particularité d’être à la fois un classico et un derby, c‘est-à-dire un match opposant deux clubs d’une même ville ou d’une même région. Un derby oppose, lui aussi, bien plus que deux clubs : il oppose en général les riches aux ouvriers, voire le club de l’armée contre celui de la police (dans les anciennes dictatures de l’Est). Un derby fort signifie que la ville a deux clubs forts. C’est la raison, pour laquelle, mis à part peut-être Saint-Etienne-Lyon ou des choses comme Rennes-Guingamp, la France n’a pas de grand derby. En Espagne, en Italie ou en Angleterre, il ya toujours eu de grands derbies : Manchester City-Manchester United, Everton-Liverpool, Arsenal-Chelsea, Atletico Madrid-Real, Barça-Espanyol de Barcelone, Lazio-AS Rome, Torino-Juventus, FC Porto – Sporting Portugal.
Ou, comme ce soir, un Milan AC – Inter Milan qui, de tout temps, s’est appelé « derby della Madonnina », par dévotion à la Madone dorée juchée sur les toits de la cathédrale de Milan. L’Inter aux origines bourgeoises face au Milan AC d’origine populaire. L’Inter qui a trusté les titres dans les années 2000 face au Milan qui, racheté par Berlusconi, en avait fait de même entre la fin des années 1980 et le milieu des années 2000. Inter et Milan AC : quatre Champions League et dix-huit titres de champion d’Italie chacun. Deux clubs qui partagent le même stade : San Siro, de son vrai nom Giuseppe Meazza, un des joueurs transalpins à avoir porté les couleurs des deux équipes. Ce soir, un autre joueur sera dans le même cas : Antonio Casano, récent transfuge du Milan AC à l’Inter. Celui-là même qui, lors de l’Euro, était certain qu’il n’y avait pas d’homosexuels dans la Squadra, et que s’il y en avait eu c’eut été « leur problème ».
Dans les années 1960, un Milan AC – Inter était un match entre les deux génies italiens d’alors, Mazzola et Riveira.
Dans les années 2000, c’était l’assurance de voir sur la pelouse des hommes comme Beckham, Ronaldinho, Kaka, Ibrahimovic, Eto’o, Thiago Silva, Thiago Motta. En 2012, les deux clubs sont sous le joug d’une politique d‘austérité.
Le jeu, comme le rendez-vous de ce soir, ne suscitent plus le même engouement sportif. Mais l’élan local, lui, est toujours là, et ce match est toujours lourd de sens.
21h : Olympique de Marseille – Qatar-Saint-Germain
Tout fut écrit ici.
23h : Ibrahimovic plus grand dénominateur commun
Au final, à l’issu ce dimanche d’Europe, un seul homme aura, au long de sa carrière, disputé chacun de ces classicos. Eh oui, c’est Zlatan. Ibrahimovic joua en effet à l’Inter Milan (2006-2009), au Barça (la saison 2009-2010), au Milan AC (2010-2012), avant de partir chez les Qatariens du Paris-Saint-Germain. Lui seul a joué tous ces hauts matches.
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