07 août 2014

Marcelo Bielsa pour sa première conférence de presse : «les grands leaders parlent peu»

Ce jeudi avait lieu la première rencontre du nouvel entraîneur marseillais avec la presse. Un moment à la fois simple et tout à fait surréaliste. Retour.

(De Marseille)  « Oh, c’est un évènement ! », entendait-on devant l’entrée du centre Robert-Louis Dreyfus. Une heure avant les conférences de presse d’avant-match, les journalistes se retrouvaient aux portes du siège du club, la Commanderie, qui en est aussi le centre d’entrainement.

A 17 heures, oui, c’était évènement : celui qui pour le moment est la star du recrutement allait, enfin, s’exprimer devant les journalistes.

 

Lever de rideau

 

En guise d’ouverture de rideau, l’OM a carrément dépêché une de ses stars, dont l’avant-saison est aussi irréprochable que la saison dernière avait été décevante eu égard aux attentes : Florian Thauvin. Pas un hasard bien sûr : samedi, pour l’ouverture du championnat, les marseillais iront à Bastia, c’est-à-dire le club où le jeune attaquant se révéla en 2012-13. En outre, depuis l’an dernier, il est le joueur marseillais dont il se vend le plus de maillot floqués à son nom.

Comme sachant que l’évènement était à suivre plus qu’à vivre sur l’instant, Thauvin répondit durant une petite vingtaine de minutes. Cours, concis. Voyez la vidéo (issue du site du club).

 


 

Ouvert et malicieux, franc mais pas (encore) dans les yeux

 

Lorsqu’il entrait dans la salle de presse, Marcelo Bielsa faisait face à quatorze caméras, une dizaine de photographes, et une quarantaine de journalistes. Durant les minutes précédentes, nous nous étions tous demandé comment et par quoi commencer. Le premier confrère y alla direct, lui demandant s’il avait conscience de son apparition tardive, et de l’attente engendrée. Le coach marseillais de répondre :

L’attente, c’est une lecture que je ne peux évaluer pour l’instant. Je me sens bien et l’attente était par rapport à ce que demandait le club. Il n’y a jamais eu autant de diffusion de mon travail…

 

On savait pouvoir s’attendre à une conférence longue, où Bielsa répondrait à tout. C’est ce qui se passa : durant plus d’une heure, il répondit, en Espagnol, avec son adjoint Franck Passi pour interpréter (en se laissant parfois déborder ; mais pourquoi donc le club n’a-t-il pas laissé l’interprète pourtant présente aux micros faire le boulot ?!). Juste avant, il nous avait fait donner une feuille pour nous présenter son staff : un document Word, écrit en espagnol, qui en fait donnait les membres de son staff… admis à s’asseoir sur le banc lors des matchs officiels !

Une conférence de presse d’une heure : l’homme a donné. Il donnait même l’impression de souffrir, lui, qui mit trois quart d’heure à sourire, voire rire. Pire : à aucun moment, absolument aucun, Bielsa n’a regardé son auditoire dans les yeux. Un confrère lui demanda ironiquement :

Aura-t-on la chance de croiser votre regard cette saison ?

Et l’Argentin, percevant la malice, de regarder Passi en faisant mine de ne pas comprendre cette tournure française, et de dire :

 Je voudrais avoir plus de temps pour apprendre la langue. Pour le moment, j’ai les yeux plongés dans mon livre de français, et quand je pourrai lever les yeux mon livre de français, alors je vous (les journalistes) regarderai

 

C’est à ce moment qu’on vit plus de légèreté, chez un homme qui, à ce moment de l’après-midi, nous avait surtout… déroutés. Durant quarante minutes, jusque-là, Bielsa avait jonglé : disant tout maîtriser, et laissant la responsabilité entière au club sur la question des transferts, des joueurs, et de la communication. Plus il s’exprimait, et plus il le faisait par des métaphores, par des comparaisons tombant à plat, par des images se voulant précises mais qui s’avéraient catastrophiques… et incompréhensibles. Peu à l’aise à cause du barrage de la langue, peu au fait des us et coutumes en un club hexagonal et la presse, devant esquiver les questions qui fâchent, et accompagné des trois responsables de la communication du club, Bielsa ne pouvait pas répondre réellement à tout. Certes. Mais, entre des propos clairs et linéaires et d’autres, situés quelque part entre l’abstrait et le paranormal, cette conférence était un brin surréaliste. Bon, pourquoi pas.

En tout cas, nous sommes tous ressortis de là en se disant que cette saison, on allait bien s’amuser. Mais dans tous les sens, simples et tordus, du terme.

 

Verbatim

 

Voici les moments forts de cette conférence :

Pourquoi est-il venu à Marseille et à l’OM ? : « Travailler dans ce club, et dans ce stade plein, c’est enthousiasmant. Marseille est une ville avec beaucoup de diversité. Qui avance quand même dans un sens commun collectif. Je me suis dit que ce serait une expérience intéressante car Marseille va essayer d’être parmi les leaders.»

Va-t-il révolutionner l’OM ? « Non, d’aucune manière, je ne suis pas un révolutionnaire. Il n’y a aucun antécédent qui le prouve »

Va-t-il à nouveau ouvrir certaines séances d’entraînements aux journalistes –et au public (cela s’était toujours fait) ? « Il n’y a jamais eu autant de diffusion de mon travail que depuis que je suis ici. Tout ça est déjà réglé. La réunion d’aujourd’hui le montre. Je serai devant la presse une fois par semaine. Pour ce qui est des entraînements, le club diffuse des images, et c’est ce qui continuera à se faire. C’est le club qui décide. Vous donnez à l’entraineur une importance qu’il n’a pas… »

Quel recrutement, quels départs, quelles arrivées ? « L’arrivée des joueurs, c’est le club qui en décide. Je pense que c’est comme ça qu’il fait faire. Pour ceux qui s’en vont c’est pareil. Le joueur est le capital du club, alors c’est le club qu’il décide »

Les objectifs ? « Je ne me suis pas donné d’objectif. L’objectif, c’est juste le prochain match, qu’on essaiera de gagner »

Pourquoi fait-il passer ses messages par son staff, et  on directement ? « Les grands leaders ont besoin, quand ils parlent, qu’on les écoute. Et la meilleure manière d’arriver à ça est de parler peu. Ça vous fait sourire, mais les grands leaders parlent peu, et sont très écoutés lorsqu’ils viennent à parler. On verra si je suis écouté. […] Pour être volontaire et exemplaire, pas besoin de mots. D’ailleurs, ça fait 45 minutes qu’on parle, et qu’on ne dit rien »


Que pense-t-il du football français ? « C’est un football avec beaucoup de potentiel physique. Il est riche techniquement, très combatif, très disputé. […] Les joueurs français sont 100% professionnels, comme il m’est peu souvent arrivé d’en voir »

Le départ de Matthieu Valbuena ? « Pour moi, Valbuena a été le meilleur Français lors du Mondial. Je connais bien son parcours. Ce n’est pas à moi de parler de son départ. Ni celui de Souleymane Diawara. Ce n’est pas moi qui les ai décidés »

La phase de préparation de l’OM ? « Il sera important de gagner ce week-end. Vu ce qu’o, a montré durant les matches de préparation, on n’aura aucune excuse pour ne pas gagner (à Bastia) »

Sa philosophie ? « Difficile de dire au départ, mais on va essayer d’attaquer et d’avoir le plus souvent possible le ballon. Toujours avoir une supériorité numérique en défense par rapport à l’attaque adverse »

Lui et la culture française ? « C’est une culture interminable. Mais je la connais peu. »

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